?Il ny aura pas de grand soir mais ce fut une journée magnifique que ce 18 mars, où les rues de Paris ont vibré pour redonner à toute la France loxygène qui lui manquait.
Le Front de gauche a créé lévénement. Qui imaginait, il y a quelques semaines en- core, une manifestation politique populaire et citoyenne aussi massive et aussi large dans cette campagne électorale conçue, dès lorigine, pour exclure toute parole populaire, tout engagement collectif, toute espérance de transformation sociale ?
Du jamais vu ! Toutes celles et tous ceux qui, par le moindre geste, ont contribué à cette réussite ont commencé ensemble à relever le défi que nous nous fixons dans cette présidentielle : permettre au peuple et à ses attentes de changement pour décliner les paroles du chant « pas de sauveur suprême, ni dieu, ni César, ni tribun, décrétons le salut commun ! » de simposer.
La Bastille ouvre un chemin de lutte et despoir
Aux cris de « Vite, la 6e République », la Bastille ouvre un chemin de lutte et despoir. Notre pays en a un immense besoin. Il souffre trop. Avec cette marche, redevient crédible lidée que le monde du travail peut reprendre ses affaires en mains.?A droite, on avait tout prévu sauf linsurrection démocratique, sauf ce moment de basculement où des centaines de milliers de Françaises et de Français, de femmes et dhommes proclament : la politique cest notre affaire, et payer pour les riches cest fini. La mobilisation des communistes pour la réussite de cette journée exceptionnelle, joyeuse, combative, fraternelle, a été spectaculaire. Cest le fruit dun travail militant que je veux saluer ici : le lancement à la Fête de lHumanité, les 300 000 programmes Lhumain dabord diffusés depuis lors, les centaines dassemblées citoyennes dans tout le pays, dans nos quartiers et aux portes des entreprises, les milliers de distributions et cette invite constante : « sans préalable daucune sorte, mêlez-vous-en ! »
En parcourant la place de la Nation avant le départ de la marche, jai pu rencontrer et féliciter nombre dentre vous. Je profite de cette occasion pour le dire à toutes et à tous : ce travail patient, respectueux, inventif qui est le vôtre dans une campagne commune et collective est déterminant. Cest lui qui permet lentrée en campagne à nos côtés de milliers de femmes et dhommes engagés dans les combats sociaux, syndicaux, citoyens, associatifs dans le pays, qui nont plus le temps dattendre et peuvent sengager durablement dans la dynamique que le Front de gauche a fait naître. Cela donne aussi force et courage à ceux que vous avez investi de la responsabilité danimer cette bataille, à Jean-Luc Mélenchon qui porte avec talent notre ambition commune, à moi-même, à nos candidates et candidats aux législatives que nous voulons voir nombreux en juin entrer à lAssemblée nationale.
Le peuple est de retour, la gauche est de retour
La Bastille est le signe que nous avons déjà remporté une première victoire. Le peuple est de retour, la gauche est de retour.
Rien nest acquis. La bataille va être encore rude dans les semaines à venir. Mais mesurons à sa juste valeur limmense potentiel que nous ouvre le travail accompli.
Depuis dimanche, cest une nouvelle campagne qui démarre. Des milliers de nos concitoyennes, de nos concitoyens impatients de se débarrasser de Nicolas Sarkozy et de sa politique restent habités de doutes sur la portée de la victoire attendue : notre vie changera-t-elle vraiment ? Aujourdhui, la campagne du Front de gauche modifie cette situation. La victoire peut être synonyme despoir. Le potentiel de mobilisation du Front de gauche est ainsi devenu le meilleur atout de la gauche pour gagner et pour, ensuite, réussir. Ne nous laissons pas impressionner. On nous parle de « vote utile » ? Quoi de plus utile que le travail entrepris par le Front de gauche, et le vote pour son candidat ?
Oui, il redevient possible, non seulement dimaginer que ce sont là les derniers jours de la droite au pouvoir, mais aussi les temps premiers dune renaissance démocratique et dune politique de gauche dictée non par le consensus mais par la détermination à combattre la dictature de largent. Oui, il redevient possible denvisager de reprendre la main sur les richesses du pays, sur le pouvoir économique et de le soumettre aux besoins humains et sociaux.
Oui, il redevient possible denvisager à court et moyen terme linversion de lordre établi. La portée de ce que nous construisons va bien au-delà de léchéance présidentielle qui en est la première étape décisive. Ce que nous visons, cest la mise en mouvement de majorités didées et daction, de majorités électorales et populaires, autour dobjectifs de changement clairs, de majorités agissantes décidées à « ne rien lâcher » tant que ces objectifs ne sont pas atteints.
Oui, ces majorités didées et daction sont possibles si les forces populaires sen mêlent. Oui, peut devenir majoritaire, contre les logiques austéritaires, lexigence dune relance de lactivité fondée sur laugmentation des salaires, la revalorisation nette du Smic, des retraites, des pensions. Oui, peut devenir majoritaire la nécessaire reconquête de la retraite à 60 ans pour tous financée par la mise à contribution des revenus du capital et de la spéculation. Oui, peut devenir majoritaire la proposition de nationaliser les grandes banques et de fonder un pôle public bancaire et financier en changeant le rôle de la BCE. Oui, peut devenir majoritaire lexigence de réinvestissement massif dans les services publics. Oui, peut devenir majoritaire lidée que travailler, étudier, se loger, se nourrir, se soigner, se cultiver sont des droits fondamentaux qui doivent être garantis à tous en toutes circonstances. Oui, peut devenir majoritaire lexigence dune 6e République où la participation citoyenne aux décisions politiques et économiques du pays, de lentreprise aux institutions, sera constante, où la démocratie réelle et permanente sera la garantie de la transformation sociale. Oui, peut devenir majoritaire le principe de refondation dune Europe sociale, démocratique et écologique. Ce sont ces majorités didées, ces fronts de lutte qui constituent les conditions dune politique de gauche.
Comment mener à bien et réussir cette immense tâche ?
Dabord, en poussant le plus haut possible le vote Jean-Luc Mélenchon à lélection présidentielle. Des milliers délectrices et délecteurs peuvent en prendre conscience : semparer de ce bulletin de vote est le meilleur moyen de construire une victoire solide et durable sur la droite et lextrême droite, de rendre cette victoire utile à toutes celles et tous ceux qui ont le plus besoin de changement.
Ensuite, en sengageant maintenant beaucoup plus fortement dans la campagne pour les élections législatives. La victoire présidentielle ne sera rien si elle nest pas garantie par une majorité parlementaire capable de voter les lois dun changement véritable, celles qui reprendront dans les actes les rênes du pouvoir aux marchés financiers. Notre campagne des législatives peut dès maintenant donner du sens et plus de force à la campagne présidentielle. Nos candidates et candidats doivent sans attendre faire relais avec la campagne de Jean- Luc Mélenchon pour inscrire sa portée dans la durée.
Enfin, en intensifiant partout le travail de rassemblement, dassemblée citoyenne, de mise en débat et de mise en action qui permettra aux citoyens de porter ensemble les objectifs dune politique de changement. Jusquoù porter ces objectifs ? Je le répète, jusquà leur mise en uvre effective. Jusquau gouvernement ? nous questionne- t-on. Nous nen sommes pas là. Nous aurons à en décider, collectivement et souverainement, à lissue de ces deux campagnes, présidentielle et législatives. Notre objectif est clair : modifier suffisamment la situation pour rendre un vrai changement possible.
Pas question daller gouverner si la rupture avec les politiques daustérité nest pas au rendez-vous. A écouter nos partenaires de gauche, il y a encore beaucoup de chemin à parcourir pour y parvenir. Aurons-nous la force et le temps dimposer de tels changements à gauche dici fin juin ? Nous y travaillons et nous aurons à apprécier, ensemble, ce que nous avons pu, ou pas, faire bouger et comment continuer. Le Front de gauche est en mouvement. La route est engagée. Elle est belle. Ensemble, nous sommes la gauche, le cur battant de la gauche. Lesprit de conquête doit plus que jamais être notre boussole. Je compte sur vous.
Pierre Laurent
Secrétaire national du Parti communiste français, président du Conseil de campagne du Front de gauche.