À l'initiative du groupe communiste républicain et citoyen, le Sénat a débattu jeudi 4 février d'une proposition de résolution européenne, initiée par Michel Billout et Éric Bocquet, sur les conséquences du projet de traité entre l'Union européenne et les États-Unis sur l'agriculture et l'aménagement du territoire. Cette résolution a été adoptée à l'unanimité.

Ce n'est pas la première fois que nous débattons de ce projet de partenariat transatlantique pour le commerce et l'investissement (PTCI).

Par une précédente proposition de résolution européenne, j'avais alerté sur les conséquences dramatiques de l'institution d'un mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et État ; elle avait été adoptée à l'unanimité. J'espère qu'il en ira de même pour celle-ci, qui porte sur les conséquences qu'aurait le traité transatlantique sur l'agriculture et l'aménagement du territoire.

Les États-Unis se sont lancés, en ce début du XXIe siècle, dans une politique active d'accords bilatéraux ou multilatéraux, visant non seulement à réduire les droits de douane, mais à lever les obstacles non tarifaires aux échanges : développement durable, marchés publics, réglementation des investissements, de la propriété intellectuelle, procédures, concurrence.

Le président Obama, invoquant la signature du traité du partenariat transpacifique déclarait que cet accord renforcerait le leadership américain et renforcerait l'emploi aux États-Unis : on est loin d'un accord « gagnant-gagnant » !

Le commerce extérieur français représente 30 % de notre PIB et occupe un quart de nos salariés. L'aéronautique, la pharmacie, la chimie, l'agriculture et l'agroalimentaire, le luxe et l'armement sont nos plus gros secteurs d'importation, sans oublier le nucléaire.

L'Allemagne est de loin notre premier partenaire : 17 % de nos échanges. Nos cinq premiers partenaires, tous compris (Allemagne, Belgique, Italie, Espagne et Royaume-Unis) représentent la moitié de nos exportations. Mais nos échanges intra-européens stagnent et le commerce avec les émergents est versatile. D'où l'idée d'un accord transatlantique qui démantèlerait les barrières tarifaires et non-tarifaires.

Or notre agriculture est confrontée à des difficultés graves et récurrentes. Nous ne sommes plus que la cinquième exportation mondiale, alors que nous étions deuxième il y a peu. Cela menace des services de proximité : vétérinaires, abattoirs, commerces ruraux.... Le volet agricole du partenariat transatlantique pour le commerce et l'investissement aggravera les difficultés.

La filière de l'élevage serait la première touchée car les normes sanitaires et sociales sont sources de distorsion de concurrence entre les États-Unis et l'Union européenne.

L'industrialisation des fermes et la concentration géographique qui s'ensuivrait aurait des conséquences environnementales lourdes.

La filière lait serait très menacée par la disparition des labels de qualité. Les Américains commercialiseront de nombreux fromages dont la dénomination d'origine européenne a été convertie en marque...

La Commission européenne affiche sa détermination, mais la négociation risque de la mettre à l'épreuve. Bref, les objectifs qui nous tiennent à coeur risquent fort d'être remis en cause par le traité. Merci aux rapporteurs de la commission des affaires européennes et de la commission des affaires économiques de leur soutien. Le choix de société auquel nous exposent ces négociations doit faire l'objet d'un débat démocratique

Billet original sur Senat Groupe CRC