Tout d'abord, j'ai une profonde pensée pour les victimes des attentats de ce week-end, pour leurs familles et leurs proches.

Je voudrais saluer le travail exceptionnel des forces de l'ordre, des secours et des hôpitaux, qui se sont mobilisés tout le week-end pour sauver des vies.

À l'heure où nous célébrons les 70 ans de notre Sécurité sociale, les sénatrices et sénateurs du groupe Communiste, Républicain et Citoyen ne partagent pas la logique qui traverse ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.

En effet, Ambroise Croizat, fondateur de notre système de protection sociale, l'avait conçu comme un système basé sur l'activité économique, par lequel « chacun cotise selon ses moyens et reçoit selon ses besoins ».

Aussi, il faut cesser de voir notre système de protection sociale comme une dette que nous transmettrions aux futures générations et l'appréhender comme un investissement sur l'avenir, car il garantit pour toutes les générations, l'accès à la santé, à la retraite et contribue à la natalité de notre pays.

Or, vous poursuivez la politique engagée par la droite et que vous dénonciez en son temps, une politique de déconstruction de notre système pour une protection sociale à deux vitesses, où l'État garantirait uniquement le minimum aux plus pauvres, tandis que les « moins pauvres » se protégeraient par des assurances privées.

J'en veux pour preuve l'ANI de 2013, qui donne un rôle grandissant aux mutuelles et organismes complémentaires.

Il en va de même avec la modulation des allocations familiales, qui revient sur le principe d'universalité de la protection sociale.

Cette remise en cause d'un système qui a fait ses preuves dans les heures les plus difficiles de notre histoire contemporaine a uniquement pour but d'assurer une bonne gestion financière et de faire des économies.

Ainsi, Madame la ministre, vous avez répété plusieurs fois au cours des débats votre volonté de bien « gérer » les fonds de la Sécurité sociale. Or, ce sont des décisions politiques, et non uniquement comptables, qui sont attendues de la ministre que vous êtes !

Bien sûr, nous devons être vigilants sur les financements de notre système, c'est bien pour cela que nous vous avons fait de nombreuses propositions de recettes.

Cependant, les économies que vous nous proposez ont pour seul objectif de compenser les exonérations et autres crédits sociaux faits aux entreprises, aux plus grosses d'entre elles d'ailleurs.

Censées relancer la croissance et faire baisser le chômage, ces mesures bénéficient surtout à l'enrichissement des grands groupes, de leurs dirigeants et de leurs actionnaires et représentent une perte importante pour notre protection sociale !
Pour financer ces pertes de recettes, les hôpitaux sont asphyxiés et les patients sont renvoyés chez eux rapidement après leur opération, c'est ce que vous appelez le « virage ambulatoire ».

Pour financer ces pertes de recettes, il est proposé que les salariés travaillent plus longtemps et cotisent davantage, tandis que le montant des pensions est gelé.

Pour financer ces pertes de recettes, la branche Accident du Travail-Maladie Professionnelle voit son excédent ponctionné, tandis que les entreprises sont exonérées de leur responsabilité en matière de santé et sécurité au travail.

Pour financer ces pertes de recettes, les familles se serrent la ceinture : 15 % d'entre elles ont vu leurs allocations diminuer.

Enfin pour financer ces pertes de recettes, c'est le budget de l'État qui est mis à contribution. Ainsi, les ménages vont non seulement subir les conséquences que j'ai énumérées, mais verront aussi nos services publics dégradés : moins d'enseignants, moins de policiers, moins de logements sociaux, moins de magistrats, moins d'agents de nos finances publiques, de nos transports, etc. Or, ces services incarnent la justice sociale et fiscale, la redistribution des richesses, l'égalité des citoyens, quelle que soit leur origine sociale ou territoriale !

Vous poursuivez ainsi votre politique d'austérité alors que c'est une politique sociale qui devrait être mise en œuvre !

C'est le sens de nos propositions, qui visent à augmenter les recettes, plutôt qu'à diminuer les dépenses.

Ainsi, nous avons proposé la suppression des exonérations de cotisations patronales sur les bas salaires (dispositifs Fillon), soit 20 à 22 milliards d'€ par an en plus pour la sécurité sociale.

Nous sommes revenus sur la baisse du forfait social, prévue dans la loi Macron, qui coûte près d'1 milliard d'€ à la CNAV .

Nous avons proposé que la perte d'autonomie soit financée par les actionnaires, et non par les retraités : en demandant une contribution de 0,3 % sur les dividendes versés, il est possible de dégager 600 millions d'€ pour la CNSA.

Nous avons proposé de moduler les cotisations payées par les entreprises en fonction de leur politique d'emploi. En effet, les exonérations faites aux entreprises, déjà difficiles à justifier, deviennent incompréhensibles quand elles sont accordées à des entreprises qui licencient à tour de bras pour mieux satisfaire leurs actionnaires.

Tout en saluant les mesures de prévention prévues par ce texte, notamment en matière de contraception, nous avons proposé des amendements pour mieux protéger les travailleurs de l'amiante, et faciliter l'accès aux soins sur le territoire, notamment en zone rurale, de montagne ou péri-urbaine.

Mais aucune de nos propositions n'a été retenue.

Pire, la droite a profondément aggravé ce texte, parfois sans que l'on puisse en comprendre la logique. Ainsi, elle a vidé le PLFSS de sa substance en ne votant ni recettes, ni les dépenses. Voter un texte de financement en en supprimant les parties financières : quelle incohérence !

La droite a même osé, en catimini, au milieu de la nuit, reporter l'âge de la retraite à 63 ans et proposer une réforme systémique de notre système de retraite par répartition, pour le transformer en système de retraite par points, sans parler des 3 jours de carence imposés aux agents de la Fonction publique hospitalière, qui ont pourtant encore prouvé ce week-end, leur dévouement pour le service public et leur conviction au quotidien de l'intérêt général. Vous l'avez d'ailleurs constaté vous-même ce week-end, Madame la Ministre, puisque vous étiez à leur côté dans ces moments graves traversés par notre pays,

Mes chers collègues, vous l'aurez compris, ce PLFSS 2016 marque un recul en matière sociale, recul accentué par la droite sénatoriale. Le groupe communiste, républicain et citoyen votera contre ce texte.

Billet original sur Senat Groupe CRC